Le 'travail" en toute liberté
En fait, je ne souhaitais pas venir à la maternité pour le "travail" (quel vilain mot !). C'est donc l'accoucheuse qui est venue chez nous, à la maison. Vers deux heures du matin, cette nuit-là, je me suis réveillée sous l'effet des contractions. Apparemment, le grand jour était arrivé ! L'excitation montait en moi, et la nuit semblait ne jamais finir... Je me remis au lit, essayant de contrôler par la respiration les forces que la Nature avait déclenchées en moi. Je lui faisais confiance : elle avait tout prévu, depuis des centaines de génération, et je n'avais qu'à la laisser me guider à travers cette formidable aventure, que j'étais si curieuse de découvrir.
Je me rendais compte que les contractions devenaient de plus en plus fortes, avec les heures, et, curieusement, elles me paraissaient tout aussi supportables que les premières, comme si mon corps s'y adaptait progressivement. A six heures trente, n'y tenant plus, j'appelai la sage-femme, qui arriva peu après. Nous avons pris un bon petit déjeuner ensemble, avec mon mari. Entre deux contractions, j'essayais de manger quelques bouchées de croissant, me disant qu'il serait utile de prendre des forces avant le marathon... Je ne croyais pas si bien dire !
Car il ne faut pas croire que cet accouchement se passa "comme sur des roulettes". Notre petit bébé, que nous attendions pour le début de l'après-midi, n'est arrivé que peu avant minuit. Il ne semblait pas vouloir tourner sa tête dans le bon sens, et les contractions le faisaient appuyer "sur les reins", ce qui est loin d'être agréable. La sage-femme redoublait de douceur et d'écoute pour nous tous. Moi, je planais dans un autre monde. Les contractions, espacées, régulières, me demandaient de gros efforts de concentration pour y calquer ma respiration. C'est comme lorsque l'on ressent une crampe violente dans les mollets, en pleine nuit. On sait que l'on ne sentira plus rien après, que cela va passer, et on respire à fond pour qu'elle passe plus vite.
Au bout de 17 heures et malgré l'excitation du début, on commence à trouver que le marathon est long, très long. D'autant plus que l'on ne sait pas combien de temps cela va encore durer. Les forces semblent vous abandonner. Nous avons alors décidé de partir pour la maternité, distante d'une quinzaine de kilomètres seulement. Et comme par miracle, les contractions se sont rapprochées, devenant efficaces.
Un accouchement naturel
Lorsque je suis rentrée en salle d'accouchement, tout s'est déroulé suivant un scénario millénaire. Je connaissais un rôle que je n'avais jamais répété. Ma respiration se faisait tantôt haletante, tantôt sifflante, sans que je doive la contrôler. Je me laissais porter par la vague, avec la volonté farouche de faire venir mon bébé au monde. L'accoucheuse était plus que jamais à nos côtés. La poussée est une action instinctive, irrésistible, un soulagement car on sait que l'on est prêt du but. Un dernier sursaut d'énergie et puis, c'est le moment merveilleux de serrer contre sa peau son tout petit, tout chaud, encore couvert de vernix.
La sage-femme me l'a mis immédiatement au sein, d'où est venu le lait, comme par miracle. On a presque oublié de le peser, et le bain s'est donné juste à côté de moi, par mon mari. Ensuite, j'ai sauté de la table et on est monté tous les trois à pied dans ma chambre, avec ma valise sur la civière.
Après coup, je me suis rendue compte qu'un tel accouchement, parfaitement naturel, sans intervention, était chose rarissime chez nous. C'est pourquoi j'ai voulu partager mon expérience sur ce site. Aujourd'hui, je me pose des questions sur l'accouchement à domicile, principalement parce que j'ai peur de ne pas avoir la chance de renouveler une expérience aussi merveilleuse dans un milieu hospitalier.